Le décollage du Free Jazz et la révolution Coltrane
À partir des sixties, tout explose, tout déborde. John Coltrane réécrit la grammaire du jazz dans un ouragan mystique (A Love Supreme, 1965). L’éclatement du jazz modal (initié avec Kind of Blue) et du free jazz (Ornette Coleman, Albert Ayler) surprend encore aujourd’hui par sa liberté. La recherche du spirituel, de l’invisible, irrigue la décennie.
Nés dans les années 1950 mais portés au pinacle dans la décennie suivante, ces mouvements revendiquent :
- L’abandon presque total de la structure chanson (12 mesures, 32 mesures…), comme chez Sun Ra ou Coltrane.
- Une improvisation collective sans filet.
- L’intégration des timbres inédits (instruments africains, percussions multiples, voix, synthétiseurs analogiques dès la toute fin de la période).
L’âge du crossover : jazz fusion, rock et musiques du monde
Les années 1970 voient surgir la vague de la jazz fusion. Miles Davis franchit le Rubicon dès 1969 avec Bitches Brew : le disque s’arrache à plus de 400 000 exemplaires en quelques semaines, un record pour le genre (source : Rolling Stone, 1970).
Des groupes comme Weather Report, Mahavishnu Orchestra, Return to Forever fusionnent jazz, rock progressif et funk. Les métriques éclatent (Dave Brubeck et son « Take Five », 1959, popularise le 5/4, mais la décennie suivante expérimente le 7/4, le 11/8…). Les synthétiseurs, la guitare électrique, le Fender Rhodes deviennent aussi incontournables que le saxophone ténor des anciens.
Le jazz, qui hésitait jusque-là à flirter avec d’autres musiques populaires de masse, se jette corps et âme dans la pop, la soul, le Brésil, l’Afrique… Herbie Hancock s’entiche de l’électronique (Head Hunters, 1973), Chick Corea s’enivre d’orientalisme, Joe Zawinul rêve d’un jazz métissé qui fait du monde entier un patchwork sonore.