Au cœur de la pratique jazz, l’improvisation règne comme une déesse païenne. Or, les machines imposent des cadres nouveaux, parfois perçus comme des limitations. Mais loin de tuer la spontanéité, elles l’aiguisent différemment.
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Loopers et samplers : Ils permettent de jouer sur la mémoire immédiate, le bond en arrière. Un motif est capturé, puis revisité en direct. Robert Glasper ou Jacob Collier excellent dans ce jeu de miroirs instantanés, empruntant aux beatmakers hip-hop autant qu’à la tradition jazz.
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Boîtes à rythmes synchronisées : Elles donnent une structure, parfois implacable, sur laquelle l’improvisation vient ricocher. Mais certains, comme Makaya McCraven, détournent la logique séquentielle en jouant sur du live sampling, ré-injectant de la surprise et du vivant dans un monde de la boucle.
L’enjeu esthétique est de taille : poser telle séquence, la laisser vivre, ou bien la briser ? Irriguer le relief d’un solo tortueux, ou s’abandonner à la pulsation mécanique ? Cette tension nourrit l’écriture, mais aussi la réception : le public jazz d’aujourd’hui, souvent (35% selon Jazz Magazine, 2022) constitué de moins de 35 ans, a grandi avec la culture du beat, du sample, du cut.