MaDam RamDam : l’alliance audacieuse qui transcende les frontières du jazz français

2 mai 2025

En premier lieu, le collectif MaDam RamDam, ce n’est pas un groupe de jazz ordinaire. Créé autour de musiciens visionnaires basés principalement à Paris et Lyon, ce collectif s’est formé en 2017 sous l’impulsion de la percussionniste et compositrice Marcia DaMelio (dont le pseudonyme « MaDam » explique en partie le nom). Dès ses débuts, MaDam RamDam s’est défini non seulement comme un ensemble musical, mais aussi comme une entité collaborative où chaque membre façonne le son et l’identité du groupe. Ce processus participatif est au cœur de leur originalité.

Le collectif se compose d’une dizaine de musiciens venant d’horizons divers, allant du jazz traditionnel aux musiques improvisées, en passant par les rythmes africains et les textures électroniques. Parmi eux, des figures montantes comme l’altiste Léonard Fargeot et l'électro-productrice Lysiane Berrieux. Cette équipe pluridisciplinaire est la clé de leur succès : chaque morceau est un terrain d’improvisation où l’individualité nourrit la vision collective.

Ce qui frappe chez MaDam RamDam, c’est leur capacité à briser les conventions. Mais ne vous méprenez pas : leur discours musical n’est ni incohérent ni chaotique. Au contraire, tout repose sur un subtil équilibre entre expérimentation et ancrage culturel. Écoutez par exemple leur morceau emblématique "Tambours Dansants", issu de leur premier album éponyme sorti en 2020. On y retrouve des sons qui semblent tout droit sortis d’un carnaval créole, mêlés à une contrebasse grondante et des harmonies modernes rappelant le minimalisme européen.

Le collectif revendique une approche de « jazz mondialisé », en puisant dans les traditions musicales de leurs propres racines tout en regardant vers l’avant. On retrouve des rythmes polyrythmiques inspirés de l’Afrique de l’Ouest, des échos de folk brésilien, mais aussi des nappes sonores électroniques qui évoquent le clubbing urbain. Cet amalgame est le reflet d’une génération pour qui la musique est plus fluide que jamais.

Dans une interview accordée à Jazz Magazine en juin 2022, Marcia DaMelio expliquait : « Il n’y a pas un “jazz français” isolé. L’identité culturelle du jazz est hybride par nature ; notre collectif reflète simplement cette essence en embrassant sa diversité. »

Une autre facette de MaDam RamDam qui les distingue, c’est leur approche des performances lives. Si leurs enregistrements en studio sont déjà fascinants, c’est sur scène que leur magie opère pleinement. Imaginez une petite salle bondée, des corps en mouvement, une intensité qui ne faiblit pas. Ou mieux, un festival en plein air où le groove pousse le public à danser presque instinctivement. C’est ça, l’effet MaDam RamDam.

Le groupe fait appel à une pratique relativement rare dans le jazz : l’usage de "cercle rituel". Lors de leurs concerts, les musiciens s’organisent parfois en cercle, abolissant la distance physique entre eux et leur public. Cette configuration brise les barrières entre scène et spectateurs. Ce n’est pas seulement un choix esthétique : cela invite à une occupation d’espace plus démocratique, où l’énergie circule librement entre toutes les parties prenantes.

Une tournée marquante en 2023

En février 2023, MaDam RamDam lançait une tournée intitulée « Les Mondes qui Dansent », qui fera date. Avec des étapes à Paris, Marseille, et même dans des petites villes comme Limoges ou Annecy, le groupe a démontré sa volonté de ne pas rester cantonné aux grandes métropoles. Cette démarche s’inscrit dans une volonté de rendre le jazz — souvent perçu comme élitiste — plus accessible. Et cela fonctionne : de nombreux concerts ont affiché complet, preuve que leur vision rencontre un écho grandissant.

Le jazz français, bien qu’en constante évolution, a parfois tendance à se replier sur lui-même. Les influences américaines prédominent, tandis que des expressions plus novatrices peinent à se frayer un chemin. MaDam RamDam renverse cet état de fait en proposant quelque chose d’audacieux et profondément enraciné dans le local autant que dans le global.

Le collectif s’inscrit aussi dans la logique des nouveaux acteurs du jazz d’aujourd’hui, tels que l’émergence de labels comme Shikantaza Records ou encore les collectifs comme Umlaut à Paris. Ces structures cherchent à repositionner le jazz là où il a toujours été : au sein d’une culture vivante, engagée et plurielle.

Enfin, MaDam RamDam incarne une approche résolument collective. Cela peut sembler évident dans un contexte de “groupe”, mais leur méthode va plus loin. Les décisions artistiques, les arrangements et même les choix stratégiques ne reposent pas sur une figure centrale. Chaque voix compte. Et cet aspect collaboratif agit également comme un miroir, reflétant les imperfections, les inspirations et les élans qui font le sel de toute interaction humaine. Ce qui fait l’unicité du groupe, c’est en réalité le fait qu’il donne une place à tous.

Et ce n’est sans doute pas un hasard si l’un des slogans qui accompagne souvent la communication du collectif est cette phrase simple mais puissante : "Nous sommes beaucoup, et c’est ce qui nous rend forts."

MaDam RamDam n’est pas qu’un simple collectif parmi d’autres. Si l’on observe leurs trajectoires, leur impact et la manière dont ils résonnent auprès de leur public, on ne peut que voir en eux une illustration de l’avenir de la scène jazz en France. Une musique ouverte, intrépide, et prête à dialoguer avec les mille facettes de notre monde moderne.

Et peut-être est-ce là le véritable propos du jazz : une conversation perpétuelle où les identités, repliées ou éclatées, finissent par s’unir pour écrire une symphonie nouvelle.